LE ROUX Christophe

LE ROUX Christophe

Né en 1971, vit à Moisdon la Rivière (44) « Mon travail issu d’une réflexion sur l’Expressionnisme a pour sujet invariablement l’humain, d’où une récurrence obsessionnelle du portrait. Les techniques sont empruntées aux façons anciennes, avec des empâtements et glacis à l’huile ... Derrière l’apparente simplicité du sujet s’énonce, en filigrane, une narration aux ressorts complexes. Depuis peu j’aborde une écriture plus impulsive, faussement imprécise en travaillant sur l’accumulation des couches et la transparence. Je recherche l’évocation des humus charnels, végétaux et minéraux afin de traduire mieux l’ébullition de la vie dans mes sujets. Je travaille aussi sur un détachement d’intention gestuelle et formelle afin de laisser le sujet s’exprimer avec plus de liberté, hors de mes notions démodées et personnelles d’esthétique. Mes influences sont autant dans la littérature, le cinéma et la musique dont la portée poétique et narrative est grande. Le tableau fonctionne sur l’absence de mouvement et sur le silence. Une image fixe et immuable, comme un mur indestructible mais d’une rare et infinie complexité (quand le tableau est bon), d’une secrète beauté (lorsqu’il est achevé) sur lequel les fluctuations émotionnelles et celles de la pensée viennent s’écraser avant d’abandonner toute lutte dans un lâcher prise salvateur. Peindre c’est aussi donner en partage au monde cet outil de liberté. Je peins parce que la peinture est salutaire. Elle maintient par l’exigence de sa pratique la vigilance de l’esprit et l’observation rigoureuse des émotions et de la pensée. C’est donc à la fois un exercice technique extrêmement stimulant et un exercice d’introspection personnel nécessaire ». Christophe Le Roux 2009 S’impressionner de l’ordinaire en y voyant ce qui apparaît mais en laissant filtrer les images lancinantes ou furtives des visions surréalistes des rêves ; s’impressionner pour s ‘accrocher au réel hyper-réel et avoir le courage de décrypter ces visions d’outre-conscience, pour en jouir du sens, malgré l’effrayant, et trouver ainsi l’espace agrandi et le temps chevauché. En rester au regard extérieur : c’est de la peur qui étreint brutalement, mais avancer dans les perspectives : ce sont voies qui s’ouvrent aux voix intimes qui hurlent ou murmurent leur expérience de vie, la cruauté aperçue, prégnante, obsédante ou stagnante. Et de toutes ces solitudes offertes, alors de l’universel vient se coller au ressenti levé et décrit la vie. Le temps et la minutie technique sont acteurs de la richesse des images. Les tableaux mettent en scène des personnages dans le monde ouvert ou en intérieur, mais succinct, car ce qui importe c’est la personne en sa réalité. Le peintre se veut témoin et mémorialiste de ce qui a touché, blessé et qui donne à l’incarnation et à la carnation cette double facture d’achevé et d’inachevé. C’est qu’il est difficile de vivre. Si l’on n’est pas contrefait, les faits eux-mêmes et les autres viennent gauchir le corps interpellé par-dehors aussi souvent que par-dedans. Le regard vrille vers l’extérieur ses questionnements intérieurs insupportables sur l’absurdité des êtres et des faits ; des choses, même, agressent, car la peinture est mémoire ressentie ou à transmettre de ces mille attaques perforant le corps et l’esprit. Le centre semble être en suspens, inachevé comme l’est le présent, et les autres angles de vue, couche par couche aussi, transparents ou opaques, précisent comment lire la structure de la scène pourtant souvent formée de façon automatique, sans aucun doute régie par l’intuition de l’instant et laissée libre de la place à prendre. Ainsi l’observation est aussi au peintre qui se doit de rester en l’écoute attentive de son mouvement intérieur : un détail doit être fin, précis, mais ailleurs surtout pas ; les éléments sont plus sommaires que les corps qui sont les vrais révélateurs de la conscience et de la mémoire. Geneviève Roubaud, peintre et écrivain